Quelques données chiffrées
Nombre total de données et types de contacts
Nombre total de gîtes et périodes d'occupation
Première mention en Rhône-Alpes
Onze individus sont capturés en août 1958 au col de Bretolet (1936 mètres) sur la commune de Samoëns en Haute-Savoie (Aellen, 1961).
Distribution actuelle
Considérée comme une relique glaciaire, la sérotine de Nilsson est présente au nord, à l’est et au centre de l’Europe. Egalement appelée sérotine boréale, elle se reproduit jusqu’au-delà du cercle polaire. En France, elle est présente dans les régions froides ou montagneuses de l’est du pays (des Vosges au Mercantour) mais également dans le Massif central.
Contactée au moins une fois sur sept des huit départements rhônalpins (pas de donnée à ce jour dans la Loire), elle est cependant nettement plus fréquente dans les départements alpins. On dispose ainsi à ce jour de 116 données pour la Haute-Savoie, 65 pour l’Isère, 44 pour la Savoie, 21 dans la Drôme, 11 dans l’Ain, 3 en Ardèche et 2 dans le Rhône.
Espèce typiquement montagnarde, 66 % des données ont été récoltées au-dessus de 1250 mètres d’altitude et 97 % au-dessus de 500 mètres. La tranche altitudinale fournissant le plus de données est celle de 1500 à 1750 mètres (28 % des contacts), mais ceci est sans doute lié à un biais dans la pression de prospection.
Il en va de même pour les sept gîtes connus : tous sont situés à des altitudes supérieures à 750 mètres dont six entre 1000 et 1750 mètres.
Présente principalement dans les alpages, les clairières forestières, les tourbières d’altitude et au-dessus des lacs, elle fréquente également les agglomérations urbaines où elle chasse au-dessus des lampadaires.
Evolution des connaissances et des effectifs en Rhône-Alpes
La présence de la sérotine de Nilsson a été détectée sur 70 mailles au total (soit 13,5 % du territoire régional). Connue sur 22 mailles lors du précédent atlas, elle a été citée sur 62 au cours de la période de référence du présent atlas (2001-2012), soit presque un triplement du territoire occupé.
Les efforts de prospection importants mis en œuvre au cours de ces dernières années expliquent probablement ces forts gains de connaissance. Contactée sur la plupart des massifs montagneux de la région, la sérotine de Nilsson a aussi été nouvellement détectée dans deux départements : en Ardèche (trois localités) et dans le Rhône (deux localités).
L’augmentation des lieux où l’espèce a été contactée est principalement due à une meilleure prospection du fait d’un nombre croissant d’observateurs, d’inventaires plus nombreux réalisés pour les gestionnaires d’espaces naturels et des progrès dans les techniques d’identification acoustiques. Néanmoins, certains milieux fréquentés par cette espèce, alpages et tourbières d’altitude principalement, restent peu prospectés car généralement difficilement accessibles, de surcroît la nuit.
Rarement notée en période hivernale, l’espèce n’a été observée dans seulement quatre gîtes : trois sont situés en Chartreuse et un dans le Vercors.
Aucune colonie de reproduction n’étant recensée en Rhône-Alpes et les rares gîtes d’hibernation connus ayant été découverts récemment ou utilisés ponctuellement, il est difficile d’avoir une idée des effectifs et de leur évolution. Tout au plus peut-on indiquer que sa présence est régulière sur les secteurs identifiés.
Acquisition des données en Rhône-Alpes
On dispose uniquement de cinq données en hiver, toutes visuelles, avec à chaque fois un individu isolé. Les données de capture (25 sites) concernent pour l’essentiel la période estivale. L’immense majorité des données (77 %) provient de contacts acoustiques sur les mois de juillet et d’août (ces derniers totalisant 72 % des données acoustiques). Si ces deux mois d’été sont généralement très pourvoyeurs en données pour l’ensemble des espèces de Chiroptères, on constate rarement une concentration temporelle de l’information aussi marquée. Ceci peut s’expliquer par les contraintes climatiques en altitude et l’effet induit sur la pression d’observation.
Les techniques d’inventaire acoustique nous ont permis de parfaire la connaissance sur la répartition de cette espèce de haut vol, difficile à contacter par d’autres moyens.
Avec 68 individus capturés au filet, cette technique représente 26 % des données. L’immense majorité des individus capturés est constituée de mâles (n=58, pour seulement quatre femelles non reproductrices). La première femelle a été capturée au col de Bretolet (1936 mètres) en 1958, la deuxième sur une mare à 1505 mètres dans la Réserve naturelle des Hauts de Chartreuse (Isère) le 21 juillet 2002, la troisième sur un lac à 1330 mètres dans la vallée d’Abondance (Haute-Savoie) le 19 août 2009 et la quatrième sur une mare à 1680 mètres dans les Bauges (Savoie) le 11 août 2011.
Phénologie d’observation en Rhône-Alpes
La période hivernale représente moins de 2 % des données avec cinq observations visuelles. Le transit printanier (quatre données) et le transit automnal (64 données, essentiellement acoustiques) totalisent 26 % du total. La période estivale regroupe la majorité des contacts, principalement au détecteur d’ultrasons, soit près de 70 % d’entre eux (n=182).
La reproduction n’est pas attestée en Rhône-Alpes. Seul un jeune capturé dans le massif des Bauges au cours de la deuxième décade du mois d’août, et donc volant, apporte une indication sur une possible reproduction. Mais étant donnée la date de l’observation, celui-ci ne peut être considéré de manière certaine comme issue d’une reproduction locale.
Nous disposons de peu d’information sur la phénologie d’utilisation des différents terrains de chasse par les individus. Les connaissances actuelles sur l’espèce ne nous permettent pas de savoir s’il existe un phénomène de transhumance altitudinale, voire même de migration.
Gîtes utilisés par l’espèce en Rhône-Alpes
Seuls quatre gîtes d’hibernation sont connus, dont trois occupés durant la décennie passée. Trois sont des grottes et un est localisé derrière une écaille de rocher dans une falaise. Tous ces gîtes sont situés à plus de 750 mètres d’altitude et trois ont une altitude comprise entre 1000 et 1500 mètres. L’altitude maximale est de 1332 mètres.
Une femelle capturée en août 2011 dans les Bauges (Savoie) a été équipée d’un émetteur pour tenter de découvrir une colonie. Elle a été retrouvée seule, le lendemain, à 500 mètres du lieu de capture sous une mince écaille de rocher orientée au sud à 1550 mètres d’altitude. Il s’agit de l’unique donnée de gîte en période estivale dont nous disposons.
Aucune occupation de gîte arboricole n’a été mise en évidence en Rhône-Alpes pour cette espèce.
Habitats exploités en phase d’activité en Rhône-Alpes
Les données concernant les habitats de chasse proviennent essentiellement des sites de détection acoustique. On peut dès lors noter une fréquentation des agglomérations autour de 1200 mètres d’altitude principalement en juin et début juillet, une activité de chasse au dessus des lacs entre 1200 et 1660 mètres en juillet et août et sur les clairières forestières vers 1600 mètres en août.
Des points d’écoute, réalisés tous les mois entre avril et septembre aux abords d’une tourbière située vers 1400 mètres aux Contamines (Haute-Savoie), ont mis en évidence une fréquentation du site uniquement en juillet et en août. Les alpages sont exploités essentiellement en juillet-août jusqu’à 1915 mètres (mi-juin à 1350 mètres à Sallanches).
La présence du bétail (et en particulier de bovins), avec son cortège d’insectes (diptères et petits coléoptères), semble être un facteur favorable à la présence de la sérotine de Nilsson. Une étude sur les sites Natura 2000 du Chablais (Haute-Savoie), avec un passage au printemps et un en été, a montré la présence de l’espèce en été sur les alpages, généralement lorsque le bétail était présent (bovins pour l’essentiel). Elle a également été contactée en juillet sur le Salève et en Chartreuse sur des pâturages bovins.
Menaces pesant sur l’espèce en Rhône-Alpes
Bien qu’aucun gîte de reproduction ne soit connu en Rhône-Alpes, on sait que les bâtiments sont très souvent utilisés à cette fin (Arthur & Lemaire, 2009). La rénovation de l’habitat, notamment l’aménagement de combles ou la transformation de vieilles fermes ou de chalets d’alpage en maison d’habitation peut constituer une menace pour l’espèce. L’exploitation des vieux arbres présentant des cavités ou des écorces décollées peut également priver des individus de gîtes de repos.
L’abandon du pastoralisme en haute montagne (avec la disparition de son cortège d’insectes associés) et par la suite la fermeture des milieux, est sans doute le principal risque pour l’espèce. L’utilisation systématique de vermifuge pour le bétail, qui se retrouve dans les déjections détruisant ainsi diptères et coléoptères coprophages, joue vraisemblablement un rôle néfaste pour l’espèce.
Les purges de falaises pour sécuriser les voies routières, ferroviaires, ou encore les sites d’escalade, peuvent avoir un impact sur la sérotine de Nilsson et d’autres espèces qui utilisent les écailles rocheuses comme gîte.
L’implantation d’éoliennes à proximité de cols de montagne qu’elle fréquente peut également lui être fatale.
Protection de l’espèce en Rhône-Alpes
Aucun des milieux souterrains actuellement protégés dans la région n’est connu pour abriter la sérotine de Nilsson. Elle fréquente en revanche de nombreux territoires protégés sur lesquels des études ont permis de la découvrir et de donner des orientations de gestion en sa faveur. On peut citer par exemple :
les Parcs Nationaux des Ecrins (Isère) et de la Vanoise (Savoie),
les Réserves Naturelles Nationales des Hauts plateaux du Vercors (Drôme et Isère), des Hauts de Chartreuse (Isère et Savoie), de Sixt-Passy, des Contamines-Montjoie et des Aiguilles Rouges (toutes trois en Haute-Savoie),
les Parcs Naturels Régionaux du massif des Bauges (Savoie et Haute-Savoie) et des Baronnies (en projet) (Drôme),
les sites Natura 2000 du Mont Colombier (Savoie), du Salève et de la vallée d’Abondance (Haute-Savoie),
les Réserves Biologiques Domaniales de la Combe d’Ire et des Frêtes (Haute-Savoie).
Les actions répétées d’information et de sensibilisation du public sur les chauves-souris dans les bâtiments (documents, conférences, SOS…) peuvent contribuer efficacement à la protection de cette espèce.
Lacunes identifiées et actions à engager
À l’heure actuelle, aucune colonie de reproduction n’est connue en France mais la reproduction est avérée par la capture de femelles allaitantes dans les Vosges (CPEPESC Lorraine, 2009). Elle semble possible en Rhône-Alpes avec la capture d’un jeune de l’année en août. La recherche de gîtes de reproduction est donc un objectif important pour l’amélioration de la connaissance sur cette espèce.
En complément, de nombreux gîtes d’hivernage restent probablement à identifier.
On connaît encore assez peu l’écologie de cette espèce et l’utilisation des différents terrains de chasse. Des études réalisées par radiopistage devraient permettre d’améliorer grandement nos connaissances sur la sérotine de Nilsson.