• Oreillard montagnard
    Plecotus macrobullaris Kusjakin, 1965
Oreillard montagnard en vol © Y. Peyrard

Quelques données chiffrées

Nombre total de données et types de contacts



Nombre total de gîtes et périodes d'occupation


Première mention en Rhône-Alpes

La première mention de l’espèce en Rhône-Alpes date de l’été 1999 où deux colonies d’oreillards ont été trouvées en Savoie par Stéphane Vincent. L’identification de l’espèce n’a été faite qu’en 2002 par Andreas Kiefer, chercheur allemand spécialiste de l’espèce, grâce à des analyses génétiques faites sur les cadavres prélevés dans le gîte.

Distribution actuelle

État des connaissances sur la répartition de l'oreillard montagnard

Les connaissances sur la distribution de cette chauve-souris sont très incomplètes compte-tenu de sa récente description en 2001 (Kiefer & Veith, 2001) et de son ajout à la faune française.

L’oreillard montagnard est une espèce eurasiatique distribuée dans les zones montagneuses de la péninsule ibérique à celles du Caucase. En France, on la trouve dans les Pyrénées, les Alpes et la Corse.

En Rhône-Alpes, l’espèce a été contactée tout au long de son cycle biologique dans les massifs des Ecrins, de l’Oisans (Malsanne, Romanche), du Vercors, du Diois, des Bauges, de la Chartreuse, du Jura et dans les vallées montagneuses de Tarentaise, de Maurienne et de l’Arve. Cinq départements rhônalpins sont concernés par sa présence : l’Ain, la Drôme, l’Isère, la Savoie et la Haute-Savoie.

L’oreillard montagnard est sympatrique avec l’oreillard roux et l’oreillard gris dont il est difficile à distinguer sans mesure biométrique et examen minutieux en main.

L’espèce est connue pour être plutôt montagnarde. En effet, 62 % des données ont été recensées au-dessus de 1000 mètres. Le record altitudinal a été relevé pour deux mâles capturés à 1800 mètres d’altitude dans la Réserve naturelle nationale des Hauts Plateaux du Vercors. La distribution altitudinale des gîtes suit aussi cette tendance avec une majorité se trouvant entre 750 et 1500 mètres d’altitude.

Portrait d'oreillard montagnard

Evolution des connaissances et des effectifs en Rhône-Alpes

L’oreillard montagnard ayant été décrit récemment, il existe peu de données antérieures fiables. Avant cette date, des observations d’oreillards « d’allure douteuse » ont été attribuées au groupe d’espèces des oreillards indéterminés. En effet, la suspicion d’une espèce ou d’une sous-espèce existait auparavant lors de capture d’individus « atypiques ».

Le nombre de citations ne cesse d’augmenter grâce à l’évolution des dispositifs d’inventaires (détection acoustique, radiopistage) et à la progression du nombre d’observateurs. La croissance de ces données est cependant lente compte-tenu de la plus grande difficulté à mener des inventaires en montagne. La réalisation récente de plusieurs études dans des secteurs d’altitude (Vercors, Bauges, Chartreuse…) et les suivis conduits par le Parc national des Ecrins ont permis de collecter un lot significatif de données sur l’espèce.

Le département de la Drôme et le département de la Savoie rassemblent l’essentiel des observations de la région Rhône-Alpes (respectivement 39,7 % et 31,5 %). Ces chiffres traduisent vraisemblablement plus l’effort de prospection qu’une abondance particulière de l’espèce sur ces territoires.

Le faible nombre de gîtes connus pour l’oreillard montagnard et le manque de régularité dans les comptages ne permettent pas d’estimer les effectifs régionaux et encore moins les tendances d’évolution. Il n’en demeure pas moins que cette espèce semble localisée au sein de son aire de présence régionale et qu’elle n’est jamais abondante. Cet état de fait conforte son statut d’espèce « Vulnérable » sur la liste rouge régionale.

Acquisition des données en Rhône-Alpes

Comparaison entre l'oreillard montagnard et l'oreillard roux

Plus de la moitié des observations d’oreillards montagnards est issue des données liées à la capture au filet (50,7 %). La distinction « en main » est la méthode la plus fiable pour identifier cette espèce, mais c’est aussi la plus aléatoire et la plus difficile à mettre en place. Les autres méthodes concernent le reste des données avec respectivement 19,2 % pour les observations faites au gîte, 13,7 % pour l’identification acoustique et 16,4 % pour la détermination de cadavre.

Au regard de l’effort de prospection sur la région Rhône-Alpes, on se rend aisément compte que la majorité des inventaires nocturnes (83,5%) se déroule en dessous de 1000 mètres d’altitude. Parmi les données d’oreillards montagnards, acquises lors de prospections nocturnes (capture au filet et méthode acoustique), 64,5 % ont été obtenues au-dessus de 1000 mètres d’altitude (26,7 % faites entre 1250 et 1500 mètres). Les tranches altitudinales fréquentées par cette espèce sont sous échantillonnées, ce qui peut expliquer le nombre relativement faible de données.

La base de données rassemble 1797 observations d’oreillards indéterminés, dont 48,7 % concernent des identifications d’individus au gîte et 39,7 % au détecteur d’ultrasons. 30,3 % de ce lot de données concernent des localités au-dessus de 750 mètres d’altitude. La difficulté de reconnaissance spécifique des animaux en léthargie conduit dans la plupart des cas à des identifications de type « indéterminé ».

À ce jour, avec une présence notée sur 33 mailles, l’oreillard montagnard est présent sur 6,4 % de la région.

Phénologie d’observation en Rhône-Alpes

Oreillard montagnard

La majorité des inventaires conduits en montagne le sont en période estivale, c’est-à-dire lorsque les conditions sont les plus favorables. Ainsi, 75 % des observations ont été réalisées en période estivale et 19 % en transit automnal.

La période hivernale (4 %) et le transit printanier (1 %) sont à la marge des volumes de données collectées.

Le faible nombre de données certaines (73 acquises en 13 ans) montre une lacune importante concernant la connaissance de cette espèce d’une manière générale mais plus particulièrement en périodes hivernale et de transit printanier.

Le contrôle de plusieurs colonies de parturition permet d’estimer les dates des premières naissances à la dernière décade de juin. Des juvéniles volants ont été observés en compagnie d’adultes dans plusieurs gîtes jusqu’à la fin du mois d’août.

L’oreillard montagnard n’est pas connu pour avoir un comportement migrateur.

Gîtes utilisés par l’espèce en Rhône-Alpes

Les observations rhônalpines tendent à montrer que cet oreillard est très lié, pendant sa période d’activité, aux gîtes en milieu bâti. En effet, les bâtiments sont utilisés en période estivale et en période de transit automnal. Sur la vingtaine de gîte connus, 17 sont notés dans des bâtiments.

Cette prédominance des gîtes en milieu bâti peut s’expliquer par la relative facilité à les visiter. Les églises sont sélectionnées préférentiellement (65 %) et sont occupées par six colonies de reproduction sur huit, les deux autres se trouvant dans des habitations privées à la Roche-sur-Foron (Haute-Savoie) et Valbonnais (Isère). La plus importante colonie d’oreillards montagnards se trouve à Entraigues (Isère). Elle a été découverte en 2008 et comptait en août 2011 une centaine d’individus (femelles et jeunes).

Il n’est pas rare d’observer en Rhône-Alpes des colonies mixtes d’oreillards roux et d’oreillards montagnards (Vincent, 2006).

Un seul gîte hivernal est connu en Rhône-Alpes, il s’agit d’une cavité dans une ancienne mine abandonnée qui se trouve sur la commune de Brette (Drôme). Il a été découvert en 2011 et était occupé par un seul individu. Un individu trouvé mort dans un gouffre de la Haute chaine du Jura (Farges – Ain) laisse supposer l’hivernage de cette espèce dans ce massif. Une cavité naturelle sur les communes d’Aillon-le-Jeune (Savoie) a hébergé un oreillard en période de transit automnal en 2011.

Il est probable que des colonies de reproduction soient localisées en falaise mais nous manquons d’éléments pour étayer cette hypothèse. En effet ce comportement est connu chez l’espèce en Corse et l’individu suivi par radiopistage en Drôme semble avoir gîté en falaise.

Habitats exploités en phase d’activité en Rhône-Alpes

Une seule étude utilisant la méthode par radiopistage a été réalisée en Rhône-Alpes. Elle a été menée par la LPO Drôme sur le site Natura 2000 « Pelouses et forêts du plateau de la Servelle de Brette» (Aucelon, Drôme). Une femelle allaitante d’oreillard montagnard a été suivie en août 2006 pendant deux nuits. Bien que le gîte diurne n’ait pas été découvert, plusieurs éléments intéressants sont à noter : sur la période de suivi le domaine vital de cet individu a été évalué à 484 hectares et ses extrémités sont distantes de 5,26 kilomètres. Il semble que l’oreillard ait sélectionné préférentiellement pour la chasse les prairies, les pelouses de moyenne montagne et les boisements clairs de pins.

Si cette étude est la seule concernant spécifiquement la caractérisation des habitats de chasse, les données de capture et de détection acoustique permettent également d’apporter quelques éléments sur les habitats utilisés par les oreillards montagnards. Ces informations ne permettent pas d’avoir une vue globale des terrains de chasse fréquentés, mais laissent entrevoir une certaine diversité. On note que 30,6 % des données issues de capture au filet ont été faites sur des entrées et porches de cavités (naturelles et artificielles) entre mi-juillet et fin septembre. Il semble que des mâles et femelles d’oreillards montagnards fréquentent ce type d’habitat au cours de cette période en même temps que les espèces pratiquant l’essaimage.

Parmi les habitats fréquentés par les oreillards, on notera la présence de points d’eau entourés de prairies et pelouses montagnardes. De manière plus marginale, il semble que les oreillards exploitent des secteurs riverains des cours d’eau et rivières de moyenne montagne (Drôme et Haute-Savoie).

Menaces pesant sur l’espèce en Rhône-Alpes

La majorité des gîtes connus en période d’activité se trouve dans les bâtiments et notamment les églises des villages de montagne. Des éclairages de mise en valeur mal positionnés, des travaux sur les charpentes et la réfection des toitures sont autant de menaces qui pèsent potentiellement sur ces précieux gîtes. Il est donc essentiel de travailler avec les municipalités et les corps de métiers du bâtiment pour une meilleure prise en compte des chauves-souris dans les bâtiments publics.

La réhabilitation des bâtiments privés, et notamment des combles, peut constituer une menace non négligeable pour la conservation des populations de l’espèce. La sensibilisation du grand public au sujet des Chiroptères en milieu bâti est également importante dans le cadre d’une conservation efficace en faveur de l’oreillard montagnard.

Les terrains de chasse des oreillards montagnards ne semblent pas aujourd’hui menacés. La conservation des corridors écologiques assurant la fonctionnalité des domaines vitaux s’avère ainsi essentielle.

Protection de l’espèce en Rhône-Alpes

Peu d’actions de protection spécifique à l’espèce ont été conduites. Des projets de conventionnements « Refuges pour les chauves-souris » sont en cours avec les communes de Valbonnais et le Parc national des Ecrins.

De nombreux sites de chasse sont inclus dans des périmètres de sites Natura 2000, de réserves ou encore de Parcs nationaux. Les pratiques et actions de gestion en cours sur ces espaces devraient garantir ponctuellement la pérennité d’habitats favorables à l’oreillard montagnard.

Colonie de parturition d'oreillards montagnards © Y.Peyrard

Lacunes identifiées et actions à engager

On ne sait presque rien aujourd’hui en Rhône-Alpes de ce que deviennent les oreillards montagnards entre le mois de novembre et le mois de mai et encore trop peu de choses sur la période de juin à novembre. Au regard de cet évident manque de données, il serait important de préciser la répartition de l’espèce sur les massifs montagnards et de collecter les éléments de sa biologie nécessaires pour mettre en place des mesures de conservation adéquates.

Il serait important qu’un suivi annuel des huit colonies de reproduction connues soit réalisé pour mesurer leur évolution. Des suivis par radiopistage pourraient être envisagés à partir des individus de ces colonies pour identifier les terrains de chasse, les corridors et les domaines vitaux mais également afin de définir les besoins des colonies et les éventuelles menaces auxquelles elles sont confrontées.