Quelques données chiffrées
Nombre total de données et types de contacts
Nombre total de gîtes et périodes d'occupation
Première mention en Rhône-Alpes
Jean-François Desmet capture un mâle le 26 avril 1984 au lac de Flérier, commune de Taninges en Haute-Savoie.
Distribution actuelle
Le murin de Brandt est une espèce eurasiatique présente depuis le Royaume-Uni jusqu’à l’est de la Chine. En Europe, il semble montrer une préférence pour les zones sous influence continentale. En France métropolitaine, il est présent depuis le centre-est du territoire (Champagne-Ardenne, Lorraine, Alsace, Franche-Comté et Auvergne) jusque dans les domaines atlantiques et alpins où il se fait plus rare. Il est a priori absent des zones méditerranéennes mais quelques données acoustiques récentes pourraient lui être attribuées dans les Pyrénées Orientales. Aucune capture d’individu n’a toutefois pu confirmer cette présence.
En région Rhône-Alpes, ce murin est noté dans tous les départements avec une présence plus ou moins marquée selon les contextes biogéographiques. Absent des secteurs méditerranéens, il se fait rare dans les grandes plaines fortement anthropisées dominées par une agriculture intensive et une industrie importante. Les données de l’espèce les plus en altitude concernent des restes osseux retrouvés en 2002 au gouffre de l’Ourson (1824 mètres) sur la commune d’Entremont-le-Vieux (Savoie) ainsi qu’à des altitudes proches de 1800 mètres dans le Vercors (Drôme). Un mâle a été capturé au filet en juillet 2010 à l’entrée d’une grotte en Chartreuse (1741 mètres) sur la commune de Saint-Pierre-d’Entremont en Savoie.
A ce jour, les observations réalisées entre 250 et 500 mètres représentent près de 43 % du total. Au-delà, et jusqu’à 1750 mètres, le nombre de données par tranche altitudinale de 250 mètres est relativement identique (de l’ordre d’une vingtaine).
Seuls cinq gîtes sont connus en Rhône-Alpes dont seulement deux sont utilisés pour la reproduction.
Le murin de Brandt est une espèce principalement forestière qui se rencontre essentiellement dans les grands massifs boisés de la région. Sa présence est toutefois bien marquée dans certains secteurs de plaines relativement anthropisés de la région comme dans les Terres froides entre Lyon et Chambéry, ou encore dans le pays genevois et l’Albanais.
Evolution des connaissances et des effectifs en Rhône-Alpes
Acquisition des données en Rhône-Alpes
La connaissance sur le murin de Brandt est très inégale sur la région. La Haute-Savoie et la Drôme sont les départements qui ont collecté le plus de données sur l’espèce avec respectivement 33,5 et 20 % des observations réalisées sur la région depuis 1984. Les départements de la Savoie et de l’Isère suivent avec environ 14 % des observations régionales pour chacun d’eux. De grands vides sont toutefois relevés dans sa répartition, notamment dans la partie centrale de l’Isère (Massif de Chartreuse, Voironnais). Outre les exigences écologiques de l’espèce, cette répartition hétérogène est probablement pour partie liée à un biais d’observation important (nombre et disponibilité d’observateurs sur un secteur donné, capacité de reconnaissance de l’espèce par la méthode acoustique, difficulté de détermination à vue, discrétion de l’espèce, etc.).
En région Rhône-Alpes, la connaissance de l’espèce a connu une nette progression après 2000 avec une répartition passant de 3 à 77 mailles. Cet apport notable de nouvelles données est toutefois à considérer avec précaution puisque, rappelons-le, une part importante des données est issue de contacts au détecteur d’ultrasons. C’est tout particulièrement le cas dans les Terres froides et l’Isle Crémieu en Isère ou encore le pays Genevois en Haute-Savoie.
L’essentiel de cet apport de connaissances provenant d’inventaires acoustiques, une corrélation importante peut être établie entre la répartition de l’espèce sur la région et les sites d’étude où cette méthode est mise en œuvre par les chiroptérologues rhônalpins.
Phénologie d’observation en Rhône-Alpes
Le défaut global de connaissance sur l’espèce à l’échelle rhônalpine ne permet pas de définir précisément la phénologie d’observation de ce murin.
Pour l’heure, les dates de mise-bas ne sont pas connues. La seule étude menée sur une colonie de reproduction dans la région à la frontière franco-suisse a toutefois permis de noter la présence de jeunes à la fin du mois de juin, ce qui laisse supposer une mise-bas dans le courant de ce mois comme de nombreuses autres espèces de la région.
La seule donnée certaine de l’espèce en hibernation correspond à un cadavre de femelle retrouvé dans une grotte de Chartreuse sur la commune de Saint-Pierre d’Entremont (Savoie).
Aucune observation n’a permis de révéler de comportement d’essaimage dans la région et aucune donnée d’individu bagué n’a été répertoriée en Rhône-Alpes.
Des espèces dont l’identification est délicate...
Le murin de Brandt fait partie du «club» des chauves-souris dont la détermination est délicate et nécessite une bonne connaissance de l’espèce. Si la forme du pénis du mâle est un très bon critère qui permet une identification aisée, les choses se compliquent en présence d’une femelle. Plusieurs critères morphologiques (dentition, coloration du pelage, longueur de l’avant-bras…) doivent alors être croisés. La présence d’une excroissance (cuspide du cingulum) sur la troisième prémolaire est généralement considérée comme un caractère spécifique de l’espèce. Toutefois, ce petit détail de la morphologie dentaire du murin de Brandt peut parfois être absent ce qui rend très ardue la distinction avec les murins à moustaches. Par ailleurs, il a été noté que certains individus de murin à moustaches pouvaient exceptionnellement présenter un cingulum !
On comprendra que dans les situations ou un doute subsiste il convient de ne pas trancher hâtivement, tant pis si le doute subsiste…
Gîtes utilisés par l’espèce en Rhône-Alpes
Au regard des 164 données existantes pour le murin de Brandt, seuls cinq gîtes de quatre types différents (bâti, écaille en falaise, arbre et cavité souterraine naturelle) sont répertoriés.
Parmi eux, deux sont utilisés en tant que gîtes estivaux sans reproduction avérée, deux comme gîtes en période de transit printanier et un pour la mise-bas. On rappellera toutefois la découverte en 2010 d’une importante colonie d’une centaine d’individus (adultes et jeunes) en Suisse, dans un hangar situé à 30 mètres de la frontière franco-suisse.
Etant donné le faible nombre de données pour l’espèce dans la région, il parait difficile d’établir une tendance sur les préférences de cette dernière en termes de choix de gîtes.
Quelques mentions de l’espèce en gîtes hypogés correspondent à l’identification de cadavres et de restes osseux principalement au cours des années 1990. Ces données n’ont pas été prises en compte dans la phénologie d’observation étant donné l’impossibilité de définir la période d’utilisation du gîte par les individus vivants.
Des études menées en France par radiopistage montrent une nette tendance de l’espèce à fréquenter des gîtes arboricoles en période d’activité avec également des colonies de reproduction. En région Rhône-Alpes, une seule donnée fait état d’une femelle observée dans un arbre à Marcellaz-Albanais (Haute-Savoie) en 2009.
Habitats exploités en phase d’activité en Rhône-Alpes
Une seule étude télémétrique a été menée dans la région en 2010 dans le pays de Gex (Ain). Celle-ci montre une réelle affinité de l’espèce pour les milieux boisés. La femelle allaitante suivie a exploité trois secteurs de chasse constitués de boisements alluviaux et ripisylves dont les surfaces étaient comprises entre 5,5 et 7,5 hectares chacun.
Les données issues des observations par capture ou au détecteur d’ultrasons semblent également montrer une préférence pour les végétations boisées alluviales et rivulaires des paysages agricoles dans les plaines continentales de la région. Plus en altitude, dans les zones montagnardes, le murin de Brandt se rencontre préférentiellement dans les grands massifs boisés (boisements mixtes de moyenne altitude).
Sur les 32 individus capturés dans la région, on note 23 femelles pour neuf mâles. Aucune tendance de la répartition altitudinale des genres n’est visible au regard des données existantes.
La première mention régionale de l’espèce correspond aussi à la donnée la plus précoce de murin de Brandt en activité pour un individu capturé au filet (26 avril). Les autres données de ce type montrent des observations comprises entre la mi-mai et la fin-août. Les contacts issus des inventaires au détecteur d’ultrasons s’étalent du début du mois de mai à la fin du mois de septembre.
Menaces pesant sur l’espèce en Rhône-Alpes
Au regard de la faible connaissance régionale de l’espèce, il s’avère difficile d’établir précisément les menaces qui pèsent sur le murin de Brandt en Rhône-Alpes.
Cependant, les constats effectués sur sa biologie permettent de supposer certains risques. Citons a minima la destruction de gites arboricoles par les activités sylvicoles ou de gîtes en milieu bâti lors de travaux de restauration d’anciennes constructions. De plus, une gestion sylvicole mal adaptée peut entrainer une dégradation notable des habitats de chasse de cette espèce. Une autre menace potentielle et non négligeable est la fragmentation du territoire par le développement de l’urbanisation et la transformation des espaces ruraux.
Protection de l’espèce en Rhône-Alpes
Les limites de la connaissance de l’espèce dans la région sont un frein notable aux possibilités de protection de ce murin. Cependant, des actions du GCRA vont dans ce sens avec la publication d’un guide de gestion sylvicole en faveur de la biodiversité et plus particulièrement des chauves-souris. Des formations de terrain complètent ce guide.
On peut mentionner que certaines politiques actuelles en termes d’aménagement du territoire concourent à réduire l’empreinte humaine en faveur de ces espèces sensibles (limitation de la fragmentation des espaces ruraux, réduction de la pollution lumineuse, prise en compte des trames vertes et bleues, etc.), et de fait sont favorables à l’espèce.
Lacunes identifiées et actions à engager
La faible connaissance de l’espèce dans la région constitue la lacune la plus importante et il convient d’y remédier avant d’envisager d’autres actions spécifiques.
Cependant, et afin d’anticiper toute menace, il serait souhaitable de continuer dans la lignée des actions engagées pour l’amélioration des pratiques de gestion sylvicoles, la sensibilisation du grand public ainsi que de veiller à la bonne prise en compte de la biodiversité dans l’aménagement du territoire.